Springeurop Paper 16
Pourquoi l’Europe doit-elle plus écouter et investir dans la jeunesse ?
A la veille de l’important scrutin européen du printemps 2024, tous les candidats aux élections du Parlement européen et les partis et fractions qu’ils représentent doivent se poser une question primordiale : comment faire pour que cesélections suscitent auprès des jeunes qui sont l’avenir de l’Union un véritable élan d’enthousiasme et une plus grande prise de conscience des enjeux ?
Partons du constat que de nombreuses sources et analyses ont confirmé. L’Eurobaromètre « Jeunesse et Démocratie dans l’Année Européenne de la Jeunesse-Mai 2022 » a confirmé que la principale attente des jeunes était que les décideurs écoutent mieux leurs demandes et y donnent suite ( 72%). Les multiples sondages effectués par la Commission auprès des jeunes ont aussi révélé les préoccupations principales suivantes dans l’ordre des priorités :
1. La lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale ;
2. Une prise en charge mieux coordonnée des problèmes de santé publique et de pollution ;
3. Une lutte plus déterminée et efficace contre le changement climatique ;
4. Le développement d’une économie plus forte créatrice d’emploi et de prospérité ;
5. La défense des valeurs démocratiques, de la liberté et de l’Etat de droit ;
6. La défense de la paix et de la sécurité et une meilleure coopération internationale en matière de défense ;
7. La promotion de l’éducation et de la culture et un meilleur encadrement de l’enseignement et du sport.
Mais face à ces priorités que constate-t-on ?
1) Le chômage des jeunes est toujours trop élevé. Il n’est pas dû à un manque d’emplois vacants mais à l’inadéquation de l’enseignement et des formations professionnelles par rapport aux besoins. Une autre cause est la baisse de qualité de l’enseignement en général dans toute l’Union, et la rigidité du système éducatif européen qui ne favorise pas les talents et la mobilité.
En réalité, il convient avant tout de faire comprendre aux jeunes que la plupart de leurs priorités sont liées. En préservant la liberté et l’état de droit qui sont les seuls remparts contre la corruption et les contraintes des Etats totalitaires, on favorise une économie saine, libre et sans distorsions, et sans entraves pénalisantes, on crée des emplois et on diminue le chômage, seule manière efficace de lutter contre la pauvreté et l’exclusion sociale.
De même, si on favorise un enseignement exigeant et de qualité, l’adéquation entre les emplois disponibles et les qualifications sera automatiquement rétablie. Les jeunes seront aussi mieux armés pour faire face aux défis du monde contemporain. Il faudrait également remettre à l’honneur les valeurs humanistes de l’effort et de la quête de qualité, dans un environnement qui favorise la concurrence, l’excellence et le partage, dans le respect des différences.
2) Par ailleurs il faut faire prendre conscience aux jeunes que la liberté et la démocratie ne sont pas des acquis anodins et que, pour les défendre dans le monde complexe et multipolaire d’aujourd’hui, il faut donner aux générations futures à la fois l’envie et les structures qui leur permettent de les défendre. A cette fin, comme le prévoient les Traités, l’Europe doit contribuer au développement d’une éducation de qualité et y intégrer la dimension européenne de manière ambitieuse.
3) L’Europe et en particulier la Commission et le Parlement élu en 2019 ont fait des efforts louables pour édicter des nouvelles normes économiques et climatiques et dégager des budgets de relance impressionnants, mais ce qu’il faudra au nouveau Parlement c’est la conscience qu’il faut ré-enchanter la maison commune en lui rendant l’élan qui a fait sa force et son attrait depuis les origines de la construction européenne. L’Europe compte 70 millions de jeunes qui demandent tous une meilleure information sur le fonctionnement des ses institutions et la simplification de ses structures.
4) Pour stimuler la conscience européenne, l’initiative Erasmus + devrait être davantage promue et son extension à la formation et l’enseignement professionnels devrait mieux être connue et soutenue. L’accent devrait rester intraeuropéen plutôt que de développer la variante Erasmus Mundus.
5) L’éducation civique européenne devrait être un thème d’enseignement obligatoire dès le niveau secondaire, dans l’esprit des Traités.
6) La Conférence sur l’avenir de l’Europe a reconnu le rôle central des jeunes dans l’élaboration du futur de la construction européenne. Il est à regretter à cet égard que l’actuel Parlement européen ait rejeté l’idée de la création de deux agoras de la jeunesse proposée par la Conférence. La Conférence a fait de multiples autres propositions concrètes pour accroître la participation des jeunes dans la procédure de prise de décision démocratique à tous les niveaux, mais ces idées sont largement restées lettre morte à ce stade. En particulier, l’idée d’établir un « Test de la Jeunesse » (« Youth Test ») qui mesurerait l’impact sur la jeunesse de toute future réglementation européenne devrait être réexaminée avec faveur lors de la prochaine législature.
En investissant plus dans la jeunesse et en s’arrogeant plus d’ambition et d’initiative dans les questions d’emploi, de
formation, d’enseignement et de développement des technologies de pointe pour y intéresser les jeunes, le Parlement
européen pourra à nouveau susciter auprès d’eux la conscience de son utilité et la foi dans l’avenir de la construction
européenne.
Tel est notre message qui devrait guider tous ceux qui se présentent aux suffrages européens s’ils veulent mettre les
jeunes au centre de leurs préoccupations.
Janvier 2024